Tidjane Thiam, président du Parti Démocratique de Côte d’Ivoire, Rassemblement Démocratique Africain (PDCI-RDA), a franchi une étape cruciale dans son ambition présidentielle en renonçant officiellement à sa nationalité française. Cette décision, annoncée le 7 février 2025, répond à une exigence constitutionnelle qui impose aux candidats à la magistrature suprême d’être exclusivement ivoiriens. Par ce geste, l’ancien patron du Crédit Suisse confirme son engagement envers la Côte d’Ivoire et clarifie sa position pour le scrutin du 25 octobre 2025.
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Dans une vidéo diffusée sur PDCI TV, Tidjane Thiam est apparu entouré de ses avocats, expliquant qu’il s’agissait d’une démarche administrative prévue de longue date. « Nous avons donc effectué ce matin, en compagnie de mes conseils, une démarche importante dans ce processus et qui est dans le calendrier de mon programme et mon action, qui est prévue de longue date et qui a consisté à déposer ma demande de libération de la nationalité française », a-t-il déclaré. Par cette formalité, il s’assure d’être en conformité avec la loi électorale et dissipe toute ambiguïté sur son éligibilité.
Cette annonce marque un tournant dans la course à la présidence. Tidjane Thiam, élu à la tête du PDCI-RDA en décembre 2023, bénéficie d’un large soutien au sein du parti fondé par Félix Houphouët-Boigny. Toutefois, avant de pouvoir se présenter officiellement comme candidat du PDCI, il devra encore passer par une convention interne dont la date sera fixée après la réunion du bureau politique prévue le 5 avril 2025 à Yamoussoukro. Ce processus vise à garantir une désignation démocratique du porte-drapeau du parti pour l’élection présidentielle.
Si Tidjane Thiam apparaît comme le favori naturel de son parti, il devra néanmoins composer avec d’autres prétendants. Jean-Louis Billon, député et ancien ministre du Commerce, a déjà exprimé son ambition de briguer la présidence et mène depuis plusieurs semaines une campagne active à travers le pays. À travers ses meetings et prises de parole, il tente de mobiliser les militants du PDCI et de les convaincre de la pertinence de son programme pour la Côte d’Ivoire.
La compétition interne au sein du PDCI est un enjeu majeur pour l’avenir du parti. Depuis la disparition d’Henri Konan Bédié en août 2023, la formation politique a dû redéfinir sa stratégie et renforcer son unité pour espérer reconquérir le pouvoir. La présidentielle de 2025 représente une opportunité historique pour le PDCI de revenir aux affaires après plus de deux décennies de domination du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP). L’enjeu est donc de taille pour Tidjane Thiam, qui doit non seulement rassembler son camp mais aussi convaincre l’ensemble des électeurs ivoiriens de sa capacité à diriger le pays.
Son parcours plaide en sa faveur. Banquier et économiste de renommée internationale, Tidjane Thiam a occupé des postes de premier plan dans la finance mondiale et a été ministre du Plan en Côte d’Ivoire au début des années 2000. Son expertise en gestion et sa vision pour le développement du pays sont des atouts majeurs qu’il met en avant dans son argumentaire politique. Toutefois, certains observateurs estiment que son long éloignement du terrain politique ivoirien pourrait constituer un handicap. Il devra ainsi prouver sa proximité avec les réalités du pays et rassurer les électeurs sur sa capacité à répondre aux défis économiques et sociaux.
L’un des principaux défis de la campagne à venir sera également de fédérer une opposition crédible face au RHDP, le parti au pouvoir dirigé par le président Alassane Ouattara. Ce dernier, après avoir remporté un troisième mandat en 2020, n’a pas encore désigné de successeur officiel au sein de son camp. Des figures comme le Premier ministre Patrick Achi ou encore l’ancien ministre de la Défense Hamed Bakayoko (s’il est retenu par le parti) pourraient émerger comme prétendants sérieux à la présidence.
Par ailleurs, le Front Populaire Ivoirien (FPI), historiquement opposé au PDCI, pourrait également jouer un rôle clé dans la dynamique électorale. Laurent Gbagbo, revenu en Côte d’Ivoire après son acquittement par la Cour pénale internationale, reste une figure influente du paysage politique et pourrait peser sur le scrutin, que ce soit par une candidature directe ou en soutenant un autre candidat.
Dans ce contexte, Tidjane Thiam devra user de toute son habileté politique pour bâtir une alliance solide et convaincre au-delà des militants traditionnels du PDCI. Sa candidature repose sur un discours axé sur la modernisation du pays, la gouvernance transparente et la relance économique. La renonciation à sa nationalité française est un signal fort envoyé à ses détracteurs qui remettaient en question son attachement à la Côte d’Ivoire.
À quelques mois de l’échéance électorale, l’arène politique ivoirienne s’anime progressivement. Les alliances se nouent, les stratégies se précisent et les candidats affûtent leurs arguments. Pour Tidjane Thiam, le chemin vers la présidence est encore semé d’embûches, mais il vient de franchir une étape décisive en s’assurant de répondre aux critères d’éligibilité. Reste désormais à convaincre les militants de son propre camp, puis l’ensemble des électeurs ivoiriens, qu’il est l’homme de la situation pour conduire le pays vers un nouvel avenir.
Wilfrid K./La rédaction