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CAMEROUN : DÉBAT SUR LA SANTÉ PRÉSIDENTIELLE INTERDIT

Oct 11, 2024
Paul Biya W

Au Cameroun, le ministère de l’Administration territoriale a récemment pris une décision qui fait grand bruit dans les milieux médiatiques et politiques : l’interdiction de tout débat concernant l’état de santé du président Paul Biya. Cette annonce, faite dans un communiqué le 10 octobre 2024 par le ministre Paul Atanga Nji, a suscité de vives réactions, notamment en raison du contexte d’absence prolongée du président de 91 ans, qui n’a fait aucune apparition publique depuis début septembre 2024. Les spéculations autour de sa santé, qui ont pris de l’ampleur ces dernières semaines, sont désormais perçues par le gouvernement comme une menace à la sécurité nationale. Cette décision, bien que surprenante, s’inscrit dans une longue tradition de contrôle de l’information au Cameroun, mais elle met en lumière des enjeux cruciaux pour la liberté d’expression et le débat public.

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L’annonce de Paul Atanga Nji a été claire et sans ambiguïté : « Tout débat sur l’état de santé du président est désormais formellement interdit ». Cette décision fait suite aux nombreuses interrogations suscitées par l’absence prolongée de Paul Biya, président du Cameroun depuis 1982. À 91 ans, Paul Biya est l’un des dirigeants les plus âgés au monde, et son silence et absence des événements publics depuis septembre 2024 ont naturellement alimenté des rumeurs. Cependant, le ministre Atanga Nji a justifié cette interdiction en invoquant la sécurité nationale, estimant que « les débats sur l’état de santé du président de la République relèvent de la sécurité nationale ». Cette prise de position traduit une volonté claire du gouvernement de mettre fin aux spéculations et d’empêcher toute remise en question de la stabilité politique du pays, souvent étroitement associée à la figure de Paul Biya.

Le ministre a également instruit les gouverneurs de créer des cellules spécifiques pour suivre et enregistrer toutes les émissions et débats dans les médias privés. Ces cellules auront pour mission d’identifier les auteurs des « commentaires tendancieux », une mesure qui peut s’apparenter à une surveillance accrue des voix critiques et des médias indépendants. En d’autres termes, l’État souhaite maintenir un contrôle strict sur la manière dont les informations concernant le président et sa santé sont diffusées, ce qui soulève des questions sur l’avenir de la liberté de la presse dans le pays.

Cette interdiction n’a pas tardé à susciter des réactions au sein des rédactions de plusieurs médias camerounais, où elle a été accueillie avec stupéfaction. Boney Philippe, directeur de Vision 4 et présentateur du célèbre débat dominical Club d’élites, s’est exprimé sur la difficulté que cette nouvelle réglementation impose aux journalistes et animateurs de débats. Il a confié qu’il avait initialement prévu d’aborder la question de l’état de santé du président lors de son émission dominicale, mais qu’il devra désormais revoir son programme. Il se dit également inquiet du coup porté à la liberté d’expression dans le pays. Selon lui, cette mesure pourrait marquer une étape dangereuse vers une réduction de l’espace public où les citoyens peuvent discuter librement des affaires nationales.

 

Pour les défenseurs des droits humains et les organisations de la société civile, cette interdiction constitue un net recul pour la démocratie camerounaise. Selon certains, elle participe d’une stratégie plus large visant à étouffer toute forme de dissidence ou de critique envers le pouvoir en place. En empêchant les médias de discuter d’un sujet aussi essentiel que la santé du chef de l’État, le gouvernement se met à dos une partie de l’opinion publique qui voit dans ce type de débat une expression légitime des préoccupations citoyennes. D’autres, plus pessimistes, y voient une manière de dissimuler des informations potentiellement préoccupantes sur l’état de santé de Paul Biya et sur l’avenir politique du Cameroun.

La santé d’un chef d’État est un sujet sensible, surtout dans un pays où le président est au pouvoir depuis plus de quatre décennies. Paul Biya, souvent décrit comme un « sphinx », s’est montré tout au long de son mandat comme un homme politique discret, rare dans ses apparitions publiques et peu loquace sur ses affaires personnelles. Son âge avancé et son absence prolongée ont naturellement nourri des spéculations, d’autant plus que la question de la succession reste floue au Cameroun. L’interdiction des débats sur sa santé soulève donc une autre question importante : comment le Cameroun se prépare-t-il à une éventuelle transition politique ?

 

Pour certains observateurs, cette décision du ministère de l’Administration territoriale reflète une peur du vide politique. En interdisant tout débat sur la santé du président, le gouvernement espère maintenir une image de stabilité et de continuité du régime. Toutefois, cela ne fait que renforcer l’idée que le Cameroun pourrait entrer dans une phase d’incertitude politique si la santé du président venait à se détériorer davantage. D’autres pensent que cette mesure vise à préparer discrètement l’opinion publique à un futur sans Paul Biya, tout en évitant des débats qui pourraient diviser le pays.

Le Cameroun n’est pas étranger aux restrictions sur la liberté de la presse, et cette interdiction vient rappeler une fois de plus les limites imposées aux journalistes. Si certains médias sont proches du pouvoir, d’autres ont plus de mal à naviguer dans cet environnement de plus en plus restrictif. La question de la santé du président, en particulier, était devenue un sujet incontournable dans les discussions politiques et médiatiques du pays. En interdisant ces débats, le gouvernement met à rude épreuve les fondements mêmes de la liberté d’expression et de l’information.

 

L‘interdiction des débats sur l’état de santé de Paul Biya au Cameroun soulève de nombreuses questions sur la liberté de la presse, la transparence politique et l’avenir du pays. Alors que le président continue de s’éclipser de la scène publique, la société camerounaise s’inquiète de plus en plus pour l’avenir, et cette interdiction ne fait qu’alimenter des tensions déjà présentes. La situation reste donc à suivre de près, alors que le Cameroun pourrait entrer dans une période de transition politique majeure.

 

La rédaction

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